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l'empire du milieu de rien
8 mars 2010

ABSTENTION : ET SI...

Article de P.Mignard


LE CHAMP DE L’ABSTENTION

 

 

Il est en dehors de celui de la politique (mais pas du politique)… il en est même la négation.

 

L’abstention est un phénomène qui se développe en dehors de toute militance… On peut certes, appeler à l’abstention, mais c’est un appel un peu particulier et qui ne couvre d’ailleurs pas le champ de celles et ceux qui s’abstiennent. Autrement dit, personne ne peut se revendiquer du « refus de voter »… contrairement à celles et ceux qui appellent à voter pour un candidat et qui, de ce fait, peuvent parler de « leurs » électeurs. Les abstentionnistes n’appartiennent à personne. Mais, dans tous les cas, ils sont l’illustration même de la faillite du processus dit « démocratique »… Se désintéresser à ce point, voire refuser, ce qui nous est présenté comme la quintessence du processus démocratique, en dit long sur les carences de celui-ci. La dégénérescence « du » politique, en ce que l’on appelle « la » politique aboutit à la négation même de la citoyenneté, et en sa régénérescence dans un refus et une opposition à cette dérive. Autrement dit, l’abstentionniste est aujourd’hui certainement plus conscient politiquement que le « dévot qui vote pour son idole ».

 

En effet, le phénomène de l’abstention n’est plus aussi systématiquement le fait de personnes « apolitiques », péjorativement qualifiées de « pêcheurs à la ligne »( ?). La faillite du « modèle démocratique marchand » directement lié à la décadence du système marchand fait tomber les illusions. On ne s’abstient plus par négligence ou inintérêt, mais par dégoût et ras de bol d’être pris pour un imbécile par des profiteurs du pouvoir.

 

L’abstention n’est pas une idée, pas plus qu’une opinion ou une doctrine,… elle est une attitude, certains diront une posture, et en ce sens, que l’on ne s’y méprenne pas, elle est éminemment politique… et les politiciens commencent à s’en rendre compte.

 

Cette attitude, très « en creux », de l’engagement politique serait-elle méprisable ? Certainement pas. Le refus, la résistance, même s’ils ne sont pas des engagements précis pour l’avenir sont avant tout les prémisses d’une prise de conscience.

 

 

QUELS ENJEUX POUR L’ELECTION ?

 

 

Bien naïf celle ou celui qui croit qu’il y a véritablement un enjeu sérieux pour l’élection. Globalement, tout est joué d’avance…. Il suffit de regarder les précédents scrutins,… même quand la « Gauche » est passée.

 

La mécanique politique et électorale, la stratégie des partis, le rôle des institutions, la manipulation de l’opinion par les médias, les intérêts à courts, moyens et long terme d’une classe politique profiteuse et parasite,… font que, malgré une apparente démocratie,… rien ne change et rien ne peut changer…. Et on va le voir dans les mois prochains, rien ne changera.

 

C’est cette situation, complètement bloquée, sans espoir d’avenir et seulement animée par des marionnettes médiatiques qui s’agitent dans des débats sans intérêt qui entraîne peu à peu les citoyens à se détourner de l’élection.

 

Les seuls véritables enjeux sont en fait la variation des rapports de forces entre partis politiques,… Comment ceux-ci vont se partager le pouvoir et ses privilèges. Pour ce qui est des « différences politiques »,… il suffit de voir comment ils se comportent une fois au pouvoir… Que reste-t-il de l’ « expérience de la Gauche au pouvoir » ?... pas de commentaire.

 

L’ « affrontement » entre le PS et l’UMP est comparé, dans les médias, à une compétition sportive auquel on invite les spectateurs à s’intéresser, à compter les coups, à choisir son champion… Sans parler des dérives constantes qui transforment la campagne électorale en déballage de poubelles. Ca montre un peu les bas-fonds et la débilité dans lesquels est tombée « la » politique.

 

Quant aux partis dits « contestataires », voire dit « révolutionnaires », qui s’agitent dans les médias et devant les préfectures, ils n’ont, et ils le savent, aucune chance de se faire entendre. Ils peuvent donc faire des promesses dont ils sont sûrs qu’ils n’auront pas à rendre de comptes. Ils en profitent aussi pour placer à des postes politiquement, voire financièrement, intéressants de jeunes loups en pleine croissance ou des vieux chevaux de retour en manque de situation stable (des noms ?).

 

Autrement dit les élections vont passer, les problèmes vont rester.

 

 

L’ABSTENTION,… ET APRES ?

 

 

Là est la vrai question. L’abstention ne réglant rien, il est nécessaire de concevoir une autre stratégie.

 

D’abord le faux débat qui consiste à dire : « l’importante abstention ne change rien, tout se passe sans en tenir compte »,… et de prendre comme exemple les USA où à peu près un électeur sur deux ne vote pas… et où il ne se passe rien  de déterminant. C’est vrai aux USA, mais on peut faire l’hypothèse, qu’en France – la culture politique étant tout à fait différente qu’outre atlantique - et même dans d’autres pays européens, une importante abstention, à un moment donné, va être insupportable, créer un malaise collectif et être génératrice d’une interrogation générale sur sa signification.

 

Ensuite la culpabilisation classique : « c’est un droit pour lequel certains ont donné leur vie »… Ce à quoi on peut répondre qu’ils n’ont pas donné leur vie pour que des profiteurs, des parasites, voire des escrocs, s’en servent pour tout bloquer et se gaver de privilèges.

 

Enfin : que faire ? « La » politique n’a plus rien à voir avec « le » politique. Les vrais problèmes, les vraies questions ne sont que des prétextes auxquels, dans le meilleur des cas, on fait rapidement allusion, pour ne s’en tenir qu’au marketing politique : le look et autres balivernes…

 

Redécouvrir, réinvestir « le » politique c’est fuir « la » politique, son spectacle et ses dérives…

 

A la passivité, bêtise et servilité imposées par les politiciens il faut opposer des pratiques sociales nouvelles qui n’ont rien à voir avec les magouilles de « la » politique mais qui inaugurent de nouveaux rapports sociaux, aussi bien dans les luttes avec la prise en charge collective des entreprises que dans l’organisation de relations nouvelles entre producteurs et consommateurs. Ce n’est qu’à ces conditions que nous affaiblirons un système marchand qui nous conduit à la catastrophe.

 

Pas en jouant son jeu électoral, qui est piégé. Pas en l’affrontant frontalement – protégé qu’il est par ses chiens de garde et ses mercenaires, face auxquels nous n’avons aucune chance.

 

Nous devons accroître et favoriser son pourrissement, sa décomposition en développant des alternatives qui le rendront obsolète et inacceptable, et qui offrent des perspectives nouvelles de changement social.

 

 

 

Les élections ne sont aujourd’hui qu’un leurre pour nous détourner de cette tâche historique, pour nous asservir avec des pratiques dérisoires, pour nous inciter à abandonner toute initiative et à faire confiance à des individus plus soucieux de leurs intérêts personnels qu’au bien public.

 

Le champ de l’action politique est ailleurs, réinvestissons le.

 

 

 Mars 2010 Patrick MIGNARD

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